L'enfance de Rochette
« Enfant, écrit-il, mes jeux étaient un enchantement dans les bois placés à l’est et à l’ouest de la maison : c’était le charme des promenades, la cueillette des fruits, des noisettes, la recherche des nids, la fuite des animaux sauvages aperçus furtivement, mais surtout près des blocs de granit monstrueusement assemblés, c’était la présence de personnages invisibles… quelques images revivent, celle de la petite forge toute proche de la maison et aujourd’hui disparue, dont le patron, le père Fichot, permettait aux gamins du voisinage de l’aider à manœuvrer le soufflet »
« ROCHETTE », Editions de LARC.
« Mais l’usine me fascinait ; il était interdit et dangereux d’y entrer ; elle remplissait mon esprit d’une mystérieuse curiosité. Un jour, mon père m’y emmena. J’avais 6 ou 7 ans ; il fallu m’arracher au spectacle qu’elle m’offrit : dans une atmosphère d’incendie des hommes masqués s’agitent au milieu des serpents de feu, de jaillissements d’étincelles, et partout, ce sont tourbillonnements de vapeur colorées et de roues enflammées. D’autres visites dans les ateliers, et voilà que ce monde irréel devient une merveilleuse histoire : les tuyaux et les cheminées deviennent des branches et des troncs d’arbres, les poutrelles d’acier sont les entre las des frondaisons, et les lourdes machines sont les blocs de granit épars dans les clairières, tandis que les ouvriers du feu ne sont autres que les magiciens, les frères des fées sylvestres.Tout fut mêlé dans cette vision enfantine. L’usine fut une gigantesque fête foraine, avec son vacarme, ses feux d’artifices, ses personnages chamarrés évoluant dans une forêt enchantée. »
Raymond Rochette. Ecrit non daté.